Du règne social de Jésus-Christ aujourd'hui1
Jean-Marc BERTHOUD
Dans le combat contre l'humanisme athée, combat pour la restauration, dans nos
différents cantons, de l'ordre intellectuel, social, politique et moral de Dieu, et pour
le rétablissement de la primauté de notre Seigneur Jésus-Christ et de ses lois, sur les
coeurs, les intelligences et les volontés de nos concitoyens, pour tout dire, sur le pays
lui-même tout entier, c'est un privilège de m'adresser, moi protestant calviniste à
vous, de confession catholique romaine. Au nom de l'Association Vaudoise de Parents
Chrétiens je tiens à vous dire notre reconnaissance à Dieu de savoir que la lutte
que nous menons dans le Pays de Vaud, l'est également aux deux extrémités du lac Léman
: par le Renouveau Rhodanien ici en Valais, et par Réagir à Genève. Il
nous semble particulièrement heureux que ce travail de restauration chrétienne puisse
être ainsi assumé par des associations dont l'enracinement est cantonal. Ce caractère
local de nos diverses associations les rend aptes à s'adapter au cadre et aux
circonstances historiques précises, propres à chacun de nos États confédérés. La
diversité de nos actions spécifiques diverses n'est que l'expression de la richesse si
différenciée dont le tissu de notre Confédération est constitué. Mais une telle
diversité ne peut être en fin de compte profitable à chacun que si nous établissons et
maintenons des liens entre nos oeuvres diverses.
Mon exposé sera divisé en trois parties. En conclusion, je ferai quelques remarques
se rapportant à quelques résultats précis que nous avons pu obtenir dans notre action
auprès des autorités vaudoises.
La première partie traitera des bases chrétiennes communes qui permettent
malgré les différences doctrinales et spirituelles capitales que nous ne devons
en aucun cas minimiser aux catholiques et réformés convaincus que nous sommes, de
travailler de concert, chacun de notre côté, au rétablissement dans notre pays d'un
ordre public conforme au modèle éternel du Royaume de Dieu que nous donne la Loi divine.
J'aborderai ensuite quelques aspects d'une action catholique et réformée
visant à lutter contre les forces qui cherchent à détruire les fondements
spécifiquement chrétiens de notre société.
La dernière partie, à travers une méditation de la figure biblique de
Gédéon, cherchera à examiner les conditions spirituelles permettant de mener avec
succès un pareil combat.
1. Les fondements qui nous sont communs
Comment peut-il se faire qu'un chrétien réformé, tel que je le suis, dont les
convictions sont fortement enracinées dans les grandes confessions du XVIe et du XVIIe
siècles2, puisse se voir invité à adresser une conférence à une
association telle que la vôtre, association qui cherche à promouvoir l'enseignement
social traditionnel de l'Église catholique romaine ? Nous pourrions imaginer qu'une
pareille rencontre soit un fruit du mouvement oecuménique, mouvement qui a exercé une si
grande influence sur les Églises depuis plus d'un quart de siècle. Certes, sous l'effet
de cet oecuménisme, des barrières séculaires nombreuses entre chrétiens sont tombées.
Mais ici nous devons nous poser une question. Ce mouvement oecuménique, qui oeuvre avec
un si grand zèle à susciter une unité entre des chrétiens dont la tendance
non-doctrinale est manifeste, ne se fait-il pas, en fin de compte, aux dépens des
fondements véritables de la foi orthodoxe, de la doctrine chrétienne vraie, qui elle
seule est habilitée à nous unir hors de l'erreur ? Cette tendance à vouloir s'unir en
dehors de la vérité se voit autant chez les catholiques d'obédience romaine que chez
les protestants des différentes confessions. Nous nous trouvons bien loin ici de cette
adhésion à la plénitude de la foi, à l'intégralité de la foi (le sens véritable du
mot katholikon), de cette attachement à toute la Vérité qu'est notre Seigneur
Jésus-Christ qui seule peut, de manière visible, manifester la véritable Église de
Jésus-Christ, Église une, sainte, catholique et apostolique.
Dans ce sens, nous nous sentons plus proches des rigueurs et de la clarté doctrinale
polémique (même avec les erreurs et les anathèmes anti-protestants qu'il
contient !) du livre L'Union des Églises, ouvrage de jeunesse de celui qui
plus tard deviendra le Cardinal Journet3, que de la bienveillante et
généreuse confusion diplomatique, ecclésiastique et doctrinale que l'on trouve dans les
mémoires d'une figure de proue de l'oecuménisme protestant, le pasteur Marc Boegner4.
Face à la confusion engendrée par la recherche d'une unité de bas étage, de saines
réactions à la fois traditionnelles et confessantes se sont manifestées,
tant dans les milieux catholiques romains que chez les réformés confessants. Ces
réactions ont abouti à la fondation du Séminaire Saint Pie X à Écône et de la
Faculté Libre de Théologie Réformée d'Aix-en-Provence. Cette dernière est une
faculté d'obédience strictement calviniste et anti-moderniste, indépendante tant de
l'Église Réformée de France que de l'État. De telles réactions témoignent de
l'attachement (malgré des différences capitales qui les séparent) de nombreux
catholiques et protestants à l'orthodoxie doctrinale, à la véritable catholicité de
l'Église de Jésus-Christ et à la défense de l'intégralité du dépôt de la foi
apostolique. Il manifeste également un refus par beaucoup de ce que l'on pourrait
appeler, je crois à juste titre, l'oecuménisme des erreurs5.
Mais si je suis votre invité, ce n'est pas sur la base d'une telle confusion
doctrinale oecuménique, mais bien plutôt sur le fondement d'une reconnaissance
mutuelle de certains éléments de la foi chrétienne auxquels nous tenons en commun. Car
nous tenons, et les uns et les autres, fermement à l'héritage confessionnel qui est le
nôtre, et nous ne voulons, ni les uns ni les autres, à aucun prix le galvauder. Il
s'agit ici de chercher ensemble à mettre en pratique ce que, dans un éditorial de la
revue Finalités, le professeur Jean de Siebenthal appelait très justement l'oecuménisme
viril. Il s'agit ici d'une recherche d'unité chrétienne fondée, non sur de vagues
sentiments, ni sur l'escamotage des fondements de la foi aboutissant à une confusion
essentiellement moderniste, mais sur l'accord commun sur un certain nombre d'articles de
foi précis, la différence sur bien d'autres points d'une importance capitale étant par
ailleurs lucidement et franchement reconnue.
Permettez-moi d'énumérer ici de façon sommaire quelques-uns des points où l'accord
me paraît être assez clair :
Nous croyons tous à l'inspiration divine des Saintes Écritures et, en
conséquence, à leur infaillibilité et leur autorité.
Avec Jean Calvin nous adhérons (sans les mettre sur un pied d'égalité avec
l'Écriture) aux formulations doctrinales des premiers quatre Conciles oecuméniques,
allant du premier concile de Nicée (325) à Chalcédoine (451) en passant par
Constantinople (381) et Éphèse (431)6.
Nous confessons, en conséquence, le Symbole des Apôtres, le Symbole
d'Athanase, le Symbole de Nicée et les Formulations de Chalcédoine. Pour
nous, ni la doctrine de la Trinité, ni celle de l'Incarnation, telles qu'elles sont
définies par ces symboles, ne font problème.
Plus encore, en opposition explicite à tout le subjectivisme philosophique
moderne, tant nominaliste (Occam), rationaliste (Descartes) qu'idéaliste (Kant), nous
croyons que la Vérité, tout en étant d'abord la Personne divine et humaine du Sauveur
du monde et du Seigneur de toutes choses, Jésus-Christ, est également l'enseignement
qu'il a donné aux hommes et recueilli dans la Sainte Écriture. Cet enseignement est une
doctrine conceptuellement définissable que Dieu adresse à l'intelligence des hommes
créés à son image. Bien que les confessions de la Réformation et celle du concile de
Trente diffèrent profondément quant à nombre de leurs articles, elles ne diffèrent pas
quant à leurs fondements épistémologiques. Car toutes, elles utilisent la logique pour
opposer objectivement l'erreur à la Vérité. Pour notre part, nous confessons être, en
philosophie, des réalistes, non pas des réalistes thomistes ou aristotéliciens (quel
que soit le respect que nous pouvons éprouver pour ces penseurs), mais des réalistes
bibliques, car nos universaux proviennent en fin de compte de la révélation conceptuelle
de la pensée même de Dieu qu'est la Sainte Écriture elle-même. Comme le dit le grand
théologien américain d'origine néerlandaise, Cornelius Van Til (1895-1987), il ne nous
faut pas rechercher une quelconque originalité intellectuelle, mais travailler à penser
les pensées (bibliques !) de Dieu après lui.
Mais nous pouvons pousser notre accord plus loin encore. Nous croyons que la
règle doctrinale et dogmatique de notre foi, la Vérité chrétienne tout entière, est
également, et inséparablement, une éthique. Qu'il ne suffit pas d'entendre la Vérité
et d'y adhérer intellectuellement, mais que la foi véritable implique obligatoirement
que nous devons, en Jésus-Christ et par la force du Saint-Esprit, accomplir la
Vérité que nous connaissons et à laquelle, par la grâce de Dieu, nous croyons, pour
être sauvés. C'est la Loi divine contenue dans l'ensemble de l'Écriture, Ancien et
Nouveau Testament, qui définit cet ordre éthique de façon infaillible et immuable. Mais
cette Loi qui nous vient du ciel n'est pas que céleste car, malgré les effets de la
Chute, elle constitue toujours l'ordre imprimé à la Création par Dieu. En ce sens il
s'agit d'un ordre naturel, reflet imparfait de la révélation surnaturelle parfaite
qu'est l'Écriture Sainte. Cette révélation spéciale est cependant indispensable aux
hommes qui sont des créatures limitées, faillibles et pécheresses. L'ordre de cette Loi
révélée du Ciel étant également celui de la Création, il s'ensuit que cette Parole
divine s'applique à la nature tout entière et à chacun des aspects, tant personnel que
public, de la vie humaine. Ceci implique pour nous l'obligation de la formulation d'une
doctrine sociale et politique chrétienne spécifique, fondée sur la Révélation de la
Loi de Dieu et sur le respect de cet ordre créationnel constitué des formes
substantielles que, dès le commencement, Dieu a imprimé à toutes ses créatures. Le
bonheur des hommes se trouve dans leur libre obéissance à cette Loi. Pascal exprime
cette vérité de manière admirable :
La loi n'a pas détruit la nature, mais elle l'a instruite ; la grâce n'a pas détruit
la loi, mais la fait exercer7.
Dans la brochure de l'Association Vaudoise de Parents Chrétiens consacrée à
ce que nous nommons La crise de l'éthique, nous affirmons :
C'est le désir de mettre en lumière, autant que nous le pouvons, de manière fidèle,
claire et équilibrée, cette pensée éthique de Dieu pour les hommes qui informe toutes
les activités de l'Association Vaudoise de Parents Chrétiens8.
2. Jonction des traditions réformées et catholiques romaines de doctrine
sociale chrétienne
La rencontre de ce soir marque la jonction de deux traditions très précises de
pensée chrétienne sur la vie des hommes en société. Ce sont ces deux traditions que
nous allons maintenant brièvement évoquer.
A. La doctrine sociale de l'Église catholique romaine9
Au XIXe siècle, l'Église catholique romaine a connu un renouveau remarquable de sa
doctrine sociale. Confrontée aux révolutions philosophiques, politiques et industrielles
issues du siècle des Lumières, et renouvelant de manière pratique l'enseignement de
Thomas d'Aquin, l'Église catholique romaine a reformulé son enseignement social en
l'adaptant aux problèmes précis qui se posaient aux sociétés modernes. En France, tout
particulièrement, de grandes figures se sont dressées : le cardinal Pie10,
Frédéric Le Play11, Albert de Mun12 et le marquis de la Tour du
Pin13 ont, dans la deuxième partie du XIXe siècle, accompli une oeuvre
exceptionnelle dont nous sommes, aujourd'hui encore, grandement redevables. Ces penseurs
catholiques, pour la plupart des laïcs, ont été à la source du renouvellement de
l'enseignement du Magister sur les questions sociales. L'enseignement des papes Léon XIII14,
Pie X et Pie XI15, et surtout celui de Pie XII16, a remarquablement
exprimé cette doctrine sociale chrétienne. Il n'est que justice de reconnaître que
c'est l'oeuvre immense, profonde et si variée de ce dernier (et non l'initiative
conciliaire de Jean XXIII) qui fut le véritable aggiornamento de la pensée
catholique aux problèmes de notre siècle. C'est cette mise à jour que le Concile
Vatican II est parvenu à étouffer. Plus récemment, ce flambeau fut repris par de
nombreux penseurs français : Étienne Gilson17, Marcel De Corte18,
Jean Ousset19, Michel Creuzet20, Marcel Clément21, Jean
Daujat22, Louis Salleron23, Jean Madiran24 et Arnaud de
Lassus25. Mais je ne m'attarderai pas davantage à cette tradition que vous
connaissez bien mieux que moi26. Je me permets de citer ces paroles de Pie X
qui résument ce combat catholique pour restaurer toutes choses sous l'autorité divine de
la royauté sociale de notre Seigneur Jésus-Christ :
L'Église doit se plier et saccommoder, en tout ce qui est contingent et
accessoire, aux circonstances des temps et aux changements sociaux. Mais celui qui veut
agir et travailler pour l'Église doit être convaincu qu'aucun instrument ne peut servir
s'il n'est adapté à l'oeuvre qu'il doit accomplir. Ainsi pour bien exécuter son
programme, l'Action catholique a besoin de la grâce divine, et celle-ci n'est donnée
qu'à l'apostolat qui est uni au Christ. C'est seulement lorsque nous aurons formé le
Christ en nous, que nous pourrons plus facilement le redonner aux familles et à la
société. (
)
Il importe de bien définir les oeuvres auxquelles nous devons appliquer les forces
catholiques pour résoudre pratiquement la question sociale. C'est pourquoi les
catholiques doivent réunir toutes leurs forces pour combattre par les moyens justes et
légaux la civilisation anti-chrétienne ; réparer par tous les moyens les désordres si
graves qui en découlent ; replacer Jésus-Christ dans la famille, dans l'école, dans la
société ; rétablir le principe de l'autorité humaine comme représentant celle de
Dieu. Ils prendront souverainement à coeur les intérêts du peuple et
particulièrement ceux de la classe ouvrière et agricole, et non seulement en inculquant
au coeur de tous les principes religieux, seule source vraie de consolation dans les
angoisses de la vie, mais en s'efforçant de sécher leurs larmes, d'améliorer leurs
conditions économiques par de sages mesures. Ils s'emploieront par conséquent à rendre
les lois publiques conformes à la justice, à corriger celles qui ne le sont pas ; ils
défendront enfin et soutiendront avec un esprit vraiment catholique les droits de Dieu en
toutes choses et les droits non moins sacrés de l'Église27.
B. La tradition réformée d'un enseignement social conforme à la Loi de Dieu.
Je voudrais maintenant attirer votre attention sur une autre tradition celle-ci
des plus authentiquement réformées qui a, elle aussi, cherché à définir une
doctrine spécifiquement chrétienne sur la vie des hommes en société. Cette tradition
découle en droite ligne de l'oeuvre des réformateurs, et en particulier de celle de Jean
Calvin. Il semblerait qu'une part importante de la pensée économique, sociale et
politique des Réformateurs soit héritière de certains aspects de la pensée de la
chrétienté médiévale sur ces questions et en particulier de celle de Thomas
d'Aquin.
Il serait faux de voir le mouvement de réforme religieuse du XVIe siècle uniquement sous
l'aspect d'une rupture radicale avec la Chrétienté médiévale. Si, sur des points
théologiques précis des plus importants tels le sola fide, le sola scriptura,
le sola gratia (et bien d'autres encore), la rupture avec les déformations de la
théologie scolastique tardive est évidente, sur d'autres questions d'ordre plus
culturel, politique et social la continuité entre la Réforme et la Chrétienté
médiévale est tout aussi claire28.
Prenons quelques exemples précis. Il faut constater que le renouveau poétique
biblique calviniste de la deuxième moitié du XVIe siècle, qui fut si fortement marqué
par le Psautier huguenot de Clément Marot et Théodore de Bèze, se trouve être beaucoup
plus proche de l'esthétique et des préoccupations de la poésie chrétienne du Moyen
Âge que ne l'est la renaissance humaniste et catholicisante de la Pléiade29.
La musique des Psaumes est elle-même tirée d'une tradition musicale qui remonte au chant
grégorien. Dans ses sermons et ses commentaires, Calvin exprime constamment le souci de
voir la Parole de Dieu manifester sa puissance de régénération et de réformation sur
la vie de la cité, sur la vie sociale et politique, sur l'économie et sur les arts30.
Pour lui et pour ses collègues réformateurs, les sciences et l'enseignement tout entier
devaient également être réformés par la prédication de la Parole de Dieu et son
application soigneuse à tous les aspects de la vie. Nous retrouvons dans l'oeuvre du
Réformateur vaudois Pierre Viret, des préoccupations très semblables et souvent même
encore plus poussées31.
Une des conséquences de la domination sur les Églises réformées en Suisse du
pouvoir temporel fut la stagnation de cette tradition. Par la suite, la théologie
réformée s'est surtout cantonnée dans la défense d'une orthodoxie doctrinale plutôt
abstraite, relativement fermée sur elle-même et peu préoccupée des réalités du monde
profane. Elle en est devenue peu accessible au rayonnement merveilleux de la véritable
pensée biblique sur la réalité tout entière redécouverte par les Réformateurs du
XVIe siècle. Plus particulièrement à partir du siècle des Lumières, la théologie
réformée en Suisse cela à des degrés divers souffrit de l'influence
désastreuse, d'abord du rationalisme d'origine cartésienne, puis de l'idéalisme
philosophique allemand. Au dix-neuvième siècle, malgré les coups d'arrêt certains que
furent les Réveils, le Protestantisme se trouva complètement submergé par l'influence
dissolvante de la méthode historico-critique. Notre siècle a vu la naissance d'une
néo-orthodoxie existentialiste sous l'influence de Karl Barth. Mais cette néo-orthodoxie
n'était orthodoxe que de nom et ne se défit jamais de son inféodation aux erreurs de
l'idéalisme philosophique. Elle était, en conséquence, incapable d'atteindre la
réalité qui devait être l'objet de ses travaux, cela autant dans son étude de la Bible
que dans celle de la création elle-même et de la vie des hommes en société. Notre
siècle a bien vu l'apparition d'un "protestantisme social", mais ce
dernier n'avait plus de caractère spécifiquement chrétien. Fondé lui aussi sur la
critique rationaliste de la Bible, il ne disposait plus d'une base conceptuelle et
spirituelle solide pour édifier une doctrine sociale véritablement chrétienne. Faute de
fondement doctrinal (au caractère transcendant) dans la Parole infaillible de Dieu, ce protestantisme
social s'est tout simplement mis à la remorque des différents courants d'idées
sociales à la mode. Nous en voyons les fruits dans la manière dont le Conseil
oecuménique des Églises suit le vent de l'histoire, se livrant à un faux évangile
tour à tour pacifiste et révolutionnaire, moralement relativiste, syncrétiste et
paganisant, suivant ainsi le vent idéologique dominant du moment.
Le XIXe siècle a, certes, connu un Réveil évangélique important dans notre pays.
Mais ce Réveil en Suisse eut essentiellement un caractère spirituel et piétiste,
méconnaissant largement l'enseignement de la Parole de Dieu sur les questions politiques,
sociales et culturelles qui nous intéressent. Il ne sut guère renouer avec la tradition
réformée du XVIe siècle. Certes, il y eut quelques exceptions, telles celles du
pédagogue vaudois Louis Burnier32, de l'homme de lettres Alexandre Vinet33,
ou du comte Agénor de Gasparin34. Agénor de Gasparin, pour ne prendre qu'un
exemple, aborda dans une oeuvre d'une grande ampleur, de nombreux problèmes publics qui
nous préoccupent aujourd'hui.
La tradition d'une pensée réformée sur ces questions publiques s'est beaucoup mieux
maintenue dans le monde anglo-saxon que dans les pays protestants du Continent. En
Nouvelle-Angleterre, les Puritains ont tenté, avec d'importants succès, d'appliquer la
Loi de Dieu au domaine public. Mais, sur la côte est des États-Unis, le rationalisme
théologique et la vague de fond d'humanisme athée qu'il suscita finit par balayer cette
tradition de pensée chrétienne qui avait suscité, deux siècles plus tôt et de l'autre
côté de l'Atlantique, une nouvelle chrétienté35. Jusqu'à la Guerre de
Sécession, cette tradition s'est maintenue dans une assez grande mesure dans les États
du Sud chez des théologiens tels J. H. Thornwell36 et Robert L. Dabney37,
l'illustre descendant du non moins fameux Agrippa d'Aubigné38, ami et
confident de Henri IV, poète, homme d'État, soldat, historien et théologien. Mais cette
tradition s'est également éteinte, et c'est seulement depuis une trentaine d'années que
nous voyons réapparaître aux États-Unis une pensée publique et sociale réformée qui
retrouve ses racines véritablement bibliques et calvinistes.
La renaissance de cette vieille tradition réformée à la fin du siècle dernier ne
nous est cependant pas venue des États-Unis mais des Pays-Bas. Les germes en furent
semés par un autre illustre descendant d'Agrippa d'Aubigné, J. H.
Merle-d'Aubigné, le
grand historien de la Réforme du XVIe siècle. Il était l'un des chefs de file du
Réveil évangélique qui, au début du XIXe siècle, secoua la torpeur rationaliste de
Genève. Il fut pendant plusieurs années l'aumônier du roi Guillaume Ier de Hollande39.
L'historien attitré de la cour des Pays-Bas, Guillaume Groen van Prinsterer40,
fut converti sous l'effet de la prédication de Merle d'Aubigné. Il fonda le mouvement Anti-révolutionnaire
chrétien qui s'engagea dans une lutte à tous les niveaux contre les effets
antichrétiens de l'idéologie de la Révolution française. Groen fut fortement
influencé par la pensée du théologien et juriste allemand Friederich Stahl, converti du
judaïsme, qui cherchait à appliquer les enseignements de la Loi de Dieu à tous les
domaines de la vie. Mais ce mouvement ne prit un véritable essor populaire que sous
l'impulsion du pasteur, théologien, journaliste et homme d'État hollandais Abraham
Kuyper41. Kuyper fut l'initiateur d'un grand mouvement de réveil spirituel, le
chef dynamique d'un parti politique réformé, directeur de plusieurs journaux,
théologien de première envergure, fondateur d'une Université et d'innombrables oeuvres
sociales, culturelles et politiques d'inspiration chrétienne. Son action et son influence
eurent un impact immense sur la vie de son pays. Il fut premier ministre des Pays-Bas de
1901 à 1905 et, en alliance avec le parti catholique, put introduire dans les lois de
nombreuses réformes inspirées par une pensée sociale chrétienne. Pour ne citer qu'un
seul exemple, le gouvernement qu'il dirigeait fut à l'origine du système néerlandais de
ce qu'on appelle le "bon scolaire". Ce système, encore en vigueur
aujourd'hui, donne aux parents la possibilité matérielle de choisir l'établissement
scolaire auquel ils souhaitent confier l'éducation de leurs enfants, et ceci en fonction
de leurs convictions religieuses. Kuyper fonda également l'Université libre
d'Amsterdam, université où une orientation systématiquement calviniste était
donnée à toutes les matières enseignées. Sous l'impulsion d'Abraham Kuyper, les
Pays-Bas, pour un temps, refoulèrent la grande vague d'humanisme sécularisé athée
d'inspiration maçonnique le Kulturkampf qui déferla sur toute
l'Europe de la fin du XIXe siècle.
Ce flambeau fut repris par des philosophes chrétiens tels que D. H. T. Vollenhoven42
et surtout Herman Dooyeweerd43. Bien qu'affaibli, ce mouvement de réforme et
de réveil répand encore aujourd'hui aux Pays-Bas, et dans de nombreux pays où la foi
réformée confessante est encore vigoureuse, la lumière d'un enseignement chrétien
appliqué à tous les domaines de la vie. Mais la force de ce mouvement décline depuis la
fin de la Deuxième Guerre mondiale. Cette école a des prolongements importants au Canada44,
aux États-Unis, en Angleterre, en Afrique du Sud, en Australie, même au Japon, en Corée
du Sud et à Taïwan45.
Mais cest surtout aux États-Unis que la pensée réformée s'attachant à donner
des réponses chrétiennes aux problèmes sociaux, politiques et culturels de notre
société est aujourdhui la plus vigoureuse. Des milieux réformés américains ont
su adapter cette tradition néerlandaise aux conditions de leur pays. Sous
limpulsion dun contemporain de Herman Dooyeweerd, Cornelius Van Til
(1895-1987)46, théologien, philosophe et, pendant plus de quarante ans,
professeur dApologétique au Westminster Theological Seminary à Philadelphie47,
sest fondée une importante école de pensée philosophique, politique,
pédagogique, économique et scientifique chrétienne. La figure de proue en est le
pasteur Rousas John Rushdoony de lInstitut Chalcedon en Californie48.
Sa pensée, bibliquement structurée et exceptionnellement bien informée dans une
multitude de domaines, a fait lever toute une génération de jeunes penseurs chrétiens
cherchant à développer une réflexion strictement biblique dans tous les aspects de la
vie et de laction des hommes. Cest le renouveau dun calvinisme fondé
sur la Parole infaillible et inerrante de Dieu qui voit la souveraineté de Dieu sur la
société tout entière. Ce mouvement a pour but d'amener toutes les pensées des hommes
captives à lobéissance du Christ (2 Cor. 10 : 5) et joue actuellement un rôle
important dans différentes parties du monde pour le rétablissement dun
Christianisme à la fois orthodoxe et pratique. Toute une génération se lève pour
proclamer que notre Seigneur Jésus-Christ est le Souverain Législateur de nos Cités.
Lapplication de Ses lois aux problèmes inextricables de cette fin du XXe siècle
est la seule voie qui peut apporter des solutions aux situations tragiques et
désespérées dans lesquelles s'engouffrent les nations de l'Occident. C'est en vain que
les hommes cherchent en dehors de Dieu et dans la révolte contre ses commandements des
solutions à leurs maux49.
Il est frappant de constater que, dans ce combat pour trouver des solutions
chrétiennes aux questions de morale publique, des chrétiens de diverses dénominations
se retrouvent pour oeuvrer ensemble (comme co-belligérants, disait Francis
Schaeffer) hors de toute confusion ecclésiastique ou doctrinale. Ils sont convaincus que
sur ce plan, ce qui leur permet de lutter ensemble est beaucoup plus important que ce qui
les divise. Comme le prévoyait Pierre Viret ily a plus de quatre siècles, le temps
semble être venu où, plutôt que de sentre-déchirer, il importe ensemble de faire
face à notre ennemi à tous, un humanisme sans Dieu et contre Dieu, arrogant et conscient
de sa force. Si les véritables chrétiens ne parviennent pas à se serrer les coudes pour
lutter ensemble contre la montée d'un nouveau paganisme allié à l'humanisme athée qui
travaille depuis plus de trois siècles à faire disparaître toute trace des restes de
lordre divin dans nos sociétés, il est certain que tous nous serons séparément
écrasés, les uns après les autres !
La délivrance que Dieu donne
Le combat de Gédéon : quand la délivrance vient de l'Éternel
Fin 1971, nous attendions notre premier enfant. Cétait lépoque où fut
lancée la fameuse initiative populaire d'origine neuchâteloise pour la libéralisation
complète de lavortement dans notre pays. Effarés, non seulement par la
complaisance de nos autorités et par lindifférence du public face à ce drame
épouvantable, mais plus encore par le silence coupable et complice des Églises, nous
nous sommes engagés, mon épouse et moi-même, dans un combat, apparemment impossible et
futile, contre ce fléau. La correspondance dans laquelle je me suis alors engagé aboutit
à la rencontre du mouvement Oui à la vie, ce qui nous permit de découvrir que
nos préoccupations et nos craintes étaient partagées par beaucoup d'autres. Cest
par ce biais que nous avons découvert le Centre de Documentation Civique à
Lausanne, découverte qui nous mit en contact avec lenseignement social traditionnel
de l'Église catholique romaine.
En remontant cette filière, il nétait guère possible de ne pas rencontrer mon
presque homonyme, René Berthod, qui vient de me présenter à vous en décrivant mon
itinéraire spirituel et pratique de manière à m'étonner moi-même par la précision et
l'intelligence de sa compréhension du cheminement qui a été le mien. Il nous a
puissamment épaulés dans notre combat contre les réformes des structures de
lécole vaudoise. Ainsi, après des siècles de séparation, de haine, de luttes et
de souffrances et osons le dire, après le sang de nos martyrs versé par ceux du
camp romain qui croyaient ainsi plaire à Dieu ! aujourdhui nos deux
traditions se retrouvent. Serions-nous enfin venu à comprendre que notre premier
adversaire ne serait ni le papiste, ni le parpaillot, mais bel et bien ce monstre (celui
dont parlait Pierre Viret lorsqu'il appelait ces Messieurs de Berne qui voulaient dominer
l'Église, "un nouveau pape à robe courte, bien pire encore que celui à robe
longue, celui de Rome"), lÉtat sans Dieu, l'État qui se dresse contre
Dieu, contre notre Seigneur Jésus-Christ, contre la Loi de Dieu et contre Son Église,
pour le plus grand malheur de notre pays et de ses habitants. Tout cela au nom du culte
idolâtre que se vouent à eux-mêmes nos concitoyens en la personne, à la fois pitoyable
et misérable, de cet humanisme sécularisé, cet humanisme athée.
Lors de son plaidoyer en faveur dune "École pour les enfants",
René Berthod évoquait une page de Péguy50. Péguy sétonnait du petit
nombre de ceux qui osaient en toute franchise et droiture, sengager dans le combat
si urgent contre les puissances maléfiques qui avaient investi nos nations chrétiennes.
La question se pose sans doute de façon plus urgente encore aujourdhui. En cette
fin du XXe siècle le mal est plus avancé quà son début. Les combattants de la
Foi pour la Vérité et pour la Justice de Dieu sont certes moins nombreux encore à
lépoque de René Berthod quils ne létaient du temps de Charles Péguy.
La question difficile se pose alors à nous. Que nous est-il donc possible d'accomplir
avec de si médiocres effectifs, avec des troupes à ce point décimées ? La masse de nos
frères et soeurs dans la foi, l'immense majorité de nos concitoyens na-t-elle pas
rejoint les rangs de lAdversaire et, avec lui, ne se sont-ils pas tous placés du
côté de l'apparente toute-puissance de lÉtat sans Dieu et contre Dieu ? Les
institutions fondamentales de notre société, et lÉtat lui-même, ne sont-ils pas,
certes à des degrés divers, hélas ! aux mains des forces spirituelles mauvaises
que nous combattons ? Même nos autorités ecclésiastiques nembouchent guère la
trompette de la Vérité ni celle du Bien pour appeler dun son éclatant et clair
les chrétiens que nous sommes à la lutte. Tous prêchent les droits de lhomme et
les droits de Dieu que dis-je, la Loi de Dieu sont passés à l'oubli.
Et loubli, de Dieu ne l'oublions pas , conduit à la disparition de
lhomme.
Face à pareille situation, comment ne pas se lamenter, geindre, croire que tout est
perdu ? Comment, par ailleurs, éviterons-nous cette autre erreur, sans doute plus grave
encore, (car en elle se cache lorgueil), de nous croire les seuls à faire face,
héroïquement, fièrement et désespérément, à la barbarie déchaînée ? Comment
éviter ces deux vieux pièges du diable que sont lorgueil et le désespoir ?
Il nous faut voir les choses autrement, regarder ailleurs, revenir à Dieu et Le
reconnaître, dans Sa toute-puissance et Sa suprême sagesse, au-dessus de tous et maître
de tout. Dans des temps aussi misérables que les nôtres, Dieu suscita un homme en
Israël, Gédéon, pour sauver son peuple de ses ennemis. Gédéon avec une troupe de 300
hommes, des trompettes et la lumière de leurs flambeaux, mit en fuite une armée
innombrable de Madianites et dAmalécites qui sétaient répandus sur tout le
pays comme d'immenses essaims de sauterelles pour le ravager. Lisons ensemble quelques
passages de ce récit exemplaire. Nous citons la traduction du chanoine Osty :
Les fils d Israël firent ce qui est mal aux yeux de Yahvé, et Yahvé les
livra aux mains de Madian pendant sept ans. La main de Madian fut forte contre Israël. A
cause des Madianites, les fils dIsraël aménagèrent les antres qui sont dans les
montagnes, les grottes et les lieux forts. Or, chaque fois quIsraël avait semé,
Madian montait avec Amaleq et les fils de lOrient, et ils montaient contre lui. Ils
campaient auprès deux et ravageaient la récolte du pays jusquaux abord de
Gaza ; ils ne laissaient en Israël aucun moyen de subsistance, ni menu bétail, ni
boeufs, ni ânes (
) Israël fut très affaibli à cause de Madian, et les fils
dIsraël crièrent vers Yahvé.
Juges 6 : 1-6.
Voilà une situation classique dans lhistoire dIsraël, histoire classique
pour lÉglise de Dieu aussi. Le peuple de Dieu pèche, se tourne vers les idoles, et
Dieu le livre à ses ennemis. Nest-ce pas là notre histoire à nous aussi ? Nos
malheurs sociaux ne sont-ils pas dabord la conséquence de nos péchés, de notre
confiance en de faux dieux, de notre volonté de nous adapter à ce monde sans Dieu ni
Loi, de notre détermination à exclure Jésus-Christ de la primauté qui lui revient tant
dans notre vie personnelle que dans notre vie religieuse et publique ?
Mais Dieu est miséricordieux. Il entend le cri de son peuple, lui envoie dabord
un prophète pour lui dévoiler son infidélité et lui rappeler les merveilleuses
délivrances que Dieu avait dans le passé accordées à ses pères. Il appelle son peuple
à la repentance et à la conversion. Dieu se choisit alors un homme pour délivrer
Israël.
Lange de Yahvé vint sasseoir sous le térébinthe dOphra, qui
appartenait à Yoach dAbiézer. Gédéon, son fils, battait le blé dans le
pressoir, pour le soustraire aux Madianites. Lange de Yahvé lui apparut et lui dit
: "Yahvé est avec toi, vaillant guerrier !" Gédéon lui dit: "De
grâce, mon Seigneur, si Yahvé est avec nous, pourquoi donc tout cela nous est-il arrivé
? Où sont donc toutes les merveilles que nous ont racontées nos pères en disant :
Yahvé ne nous a-t-il pas fait monter dÉgypte ? Et maintenant, Yahvé nous a
rejetés et il nous a livrés à la poigne de Madian."
Yahvé se tourna vers lui et dit : "Va avec cette vigueur qui est tienne, et
tu sauveras Israël de la poigne de Madian. Ne t'ai-je pas envoyé ?" Gédéon lui
dit : "De grâce, mon Seigneur, avec quoi sauverai-je Israël ? Voici que
mon clan est le plus faible de Manassé, et moi je suis le moindre dans la maison de mon
père." Yahvé lui dit : "Mais je serai avec toi, et tu battras Madian
comme sil nétait quun seul homme."
Juges 6 : 11-17
Si nous désirons vaincre les puissances qui détournent notre pays de son obéissance
à Dieu et à ses lois et je ne doute pas que tel soit notre désir à tous
il nous faut résolument nous détourner de deux erreurs qui nous seraient fatales.
Nous pourrions commodément appeler la première celle du relativisme historique.
Ce récit de Gédéon serait alors dun autre âge. Les temps ont changé et des
miracles aussi extraordinaires de la part de Dieu ne sont plus pour aujourdhui.
Cette tentation nest pas nouvelle car elle fut celle de Gédéon lui-même. Vous
avez sans doute remarqué ce quil disait à Dieu :
Où sont toutes les merveilles que nous ont racontées nos pères ?
Juges 6 :13
Les temps ont certes changé et nos conditions de vie ne sont plus guère celle qui
prévalaient en Israël au premier millénaire avant Jésus-Christ. Mais la nature des
choses a-t-elle changé ? Plus encore, Dieu lui-même aurait-il changé ? Nous savons que
ni les lois qui régissent la nature, ni celles qui gouvernent la vie intellectuelle,
morale et spirituelle de lhomme ne peuvent changer. En Dieu lui-même il ny a "ni
variation, ni la moindre ombre de changement" (Jacques 1 : 17). Il nous faut
laffirmer très nettement : notre situation nest pas foncièrement différente
de celle de Gédéon. Nous devons comprendre que le relativisme est une tentation
dincrédulité. Cette tentation il nous faut la rejeter.
La deuxième erreur à éviter à tout prix est celle que nous pourrions appeler la tentation
démocratique. Non pas qu'il faille s'opposer à la démocratie en tant que telle. La
démocratie, comme forme de gouvernement, vaut bien dautres systèmes, ayant des
dangers et des grandeurs qui lui sont propres. Mais je pense au vice du culte du nombre,
du culte de la majorité, du poids de lopinion. Nous pensons trop souvent que la
majorité numérique peut tout. Nous allons voir la leçon que Dieu donne à Gédéon.
Mais dabord, remarquons que la première tâche que Dieu exigea de Gédéon fut
celle dabattre les idoles du culte familial infidèle.
Or cette nuit-là, Yahvé lui dit : "Prends le veau gras qui est à ton père.
Tu démoliras lautel de Baal qui est à ton père, et tu couperas le pieu sacré qui
est à côté ; tu bâtiras à Yahvé ton Dieu, au sommet de ce lieu fort, un autel bien
disposé, tu prendras le veau gras et tu loffriras en holocauste avec le bois du
pieu sacré que tu auras coupé."
Josué 6 : 25-26.
La sanctification de Gédéon et de sa famille, et du culte quils célébraient,
était la condition préalable à la victoire. Pour nous aujourdhui, il en est de
même. Cest en Esprit et en Vérité que nous devons offrir à Dieu le culte saint
qui lui est dû. Nous devons rejeter toute forme d'idolâtrie dans le culte que nous
rendons à Dieu.
Obéissant à lordre que Dieu lui donne, Gédéon rassemble une grande armée
pour combattre Madian, Amaleq et tous les fils de lOrient qui étaient montés
contre Israël. Mais Dieu ne veut pas dune armée si nombreuse. La puissance de Dieu
saccomplit dans la faiblesse de lhomme. La croix du Christ en est le modèle.
Car, nous dit saint Paul dans la première Épître aux Corinthiens :
Mais ce quil y a de fou dans le monde, cest ce que Dieu a choisi pour faire
honte aux sages ; et ce quil y a de faible dans le monde, cest ce que Dieu a
choisi pour faire honte à ce qui est fort ; et ce qui dans le monde est sans naissance et
ce que lon méprise, cest ce que Dieu a choisi ; ce qui nest pas, pour
abolir ce qui est, afin quaucune créature naille se vanter devant Dieu. Car
cest par lui que vous êtes en Jésus-Christ qui, de par Dieu, est devenu pour nous
sagesse, justice et sanctification et rachat, afin que, selon quil est écrit, celui
qui se vante, quil se vante dans le Seigneur.
1 Corinthiens 1 : 27-31
Cest dans cette perspective que Yahvé sadresse à Gédéon :
Yahvé dit à Gédéon : "Le peuple qui est avec toi est trop nombreux pour
que je livre Madian entre ses mains : Israël se glorifierait contre moi en disant :
Cest ma main qui ma sauvé. Et maintenant proclame donc aux oreilles du peuple
: Quiconque a peur et tremble, quil sen retourne." Gédéon les mit à
lépreuve. Du peuple vingt-deux mille hommes sen retournèrent, et il en resta
dix-mille.
Juges 7 : 2-3
Mais ce nombre était encore trop grand. Pour terminer, Dieu ne se réserve que 300
hommes pour combattre contre Madian. Vous connaissez la suite du récit. Avec ses trois
cents combattants, Gédéon, armé seulement de torches et de trompettes, par la grâce du
Dieu tout-puissant, mit en fuite limmense armée des Madianites.
La tactique militaire est surprenante et, pour le moins, contraire aux usages habituels
de la guerre. Car, voyez-vous, le problème pour Dieu est exactement linverse de
celui qui nous accable si souvent. Pour nous, notre nombre nest jamais assez grand.
Pour Dieu, ce nest pas le nombre qui compte, cest la foi, le courage et la
discipline de ses troupes. Pour nous, cest la puissance qui nous fait défaut ; et
sans cette puissance, il nous semble que nous ne pouvons rien faire. Pour Dieu qui,
Lui, détient toute puissance dans les cieux et sur la terre là nest pas le
problème. Il lui faut des hommes fidèles, obéissants et courageux, comme Gédéon et
ses trois cents compagnons, et par la foi dun si petit nombre dhommes
obéissants, sanctifiés et consacrés à Dieu, les multitudes de lennemi seront
balayées comme de la paille devant la tempête de l'Éternel. Noublions pas
quun seul homme juste, appuyé par notre Seigneur Jésus-Christ, constitue pour Dieu
une majorité écrasante. Noublions pas que notre combat, sil est sur cette
terre, nest pas que temporel et terrestre. Nous luttons avec les armes de Dieu dans
ce combat d'abord spirituel, contre les puissances des ténèbres et leurs alliés
humains. Ceux qui sont avec nous : la Sainte Trinité, la communion des saints et
larmée des anges fidèles à Dieu, sont bien plus nombreux (et bien plus puissants)
que ceux qui, sur la terre et dans l'invisible, sopposent aux desseins de notre chef
Jésus-Christ, le Seigneur des seigneurs et le Roi des rois de la terre. Ainsi, quand nous
contemplons notre petit nombre, que cela ne soit pas pour nous, à cause de notre
incrédulité, une source de découragement, mais plutôt un signe que Dieu nous fait pour
nous donner courage, car il nous a promis que par des choses humbles, sans force et
folles, Dieu confondra les sages, les orgueilleux et les puissants de ce monde perdu.
Conclusion
Qui sommes-nous, vous, Renouveau Rhodanien, nous, Association Vaudoise
de Parents Chrétiens, pour affronter les Madianites, les Amalécites, les fils
de lOrient de lhumanisme sécularisé du monde moderne ? Néanmoins, contre
les Léviathans de notre siècle, avançons comme Gédéon, avec foi et courage, et au nom
du Dieu tout-puissant, nous remporterons des victoires pour notre Seigneur Jésus-Christ.
Dieu peut faire plier nos autorités à Sa sainte volonté quand des Gédéon, des David,
de fidèles chrétiens se lèvent pour combattre, se mettent à genoux pour prier. Mais il
y a bien plus encore. Dieu peut faire que les autorités de notre pays plient devant Lui
afin quelles accomplissent leur véritable mandat : être les serviteurs de Dieu
pour notre bien à tous.
À la suite de lAppel à la prière que nous avons lancé au mois de
janvier 1981 Appel qui fut lu devant le Conseil d'État vaudois par le Chancelier
lui-même des pasteurs et des laïcs ont publiquement pris position. Ces diverses
déclarations chrétiennes ont connu une très large diffusion. Pour notre part, nous les
avons fait connaître sous la forme dune brochure intitulée: "Des lois et
des moeurs : Positions chrétiennes." Comme vous le savez, une pétition
fédérale fut lancée depuis le Valais contre la révision des articles du Code pénal
relatifs aux moeurs et à la famille. À la suite de ces différentes actions et en
réponse à la consultation lancée par le Département fédéral de Justice et Police, le
Conseil dÉtat vaudois le canton de Vaud est bien connu pour son laxisme
moral fit la déclaration officielle suivante :
Le Conseil d'État reproche à la Commission dexperts de faire abstraction de la
morale ; or, quil le veuille ou non, le législateur fait de la morale, car ses
références pour punir ou ne pas punir sont du domaine de léthique sociale. Même
si elle ne doit pas être un code de morale, la loi a incontestablement une fonction
morale dans la mesure où elle est une des règles essentielles du fonctionnement de la
société où elle ne peut pas faire totalement abstraction des conceptions et des moeurs
de la grande majorité de cette société.
Et sur certaines propositions précises de la Commission dexperts, le Conseil
d'État vaudois était plus ferme encore :
Quant aux propositions de la Commission de mettre sur le même pied les rapports
homosexuels et hétérosexuels, elles sont absolument inacceptables, parce que, dans ce
domaine, les jeunes ont encore davantage besoin de protection, dune part, et parce
que, dautre part, ainsi que des affaires récentes lont démontré, la
population réagit très vivement lorsquun adulte entretient des relations sexuelles
avec un adolescent.
Enfin, en ce qui concerne linceste et la pornographie, le Conseil d'État insiste
sur limportance du concept de famille qui demeure profondément, pour une large part
de notre population, une cellule fondamentale de la société. À cet égard aussi, la
protection, notamment de la jeunesse, interdit de suivre les propositions de la Commission
dexperts51.
Nous voyons aujourdhui le Conseil d'État vaudois récidiver dans la défense du
bien commun à loccasion du Jeûne fédéral où, dans son exhortation
traditionnelle au peuple vaudois, il déclarait :
(
) Si les circonstances ayant présidé à la naissance de cette institution ont
changé, il nen reste pas moins que bien des raisons demeurent de consacrer une
journée à la reconnaissance, à la repentance et à la prière.
Sans aller chercher bien loin alors même que chaque jour nous sommes informés
dévénements tragiques et alarmants dont nous sommes dailleurs le plus
souvent préservés nous constatons que, dans notre pays et depuis quelques
années, il a rarement été autant question de la jeunesse. Tandis que forces de
lordre et manifestants se heurtent parfois violemment dans les rues des grandes
villes, thèses et antithèses saffrontent sur le papier et sur les ondes.
Plus spontanément peut-être, en tout cas plus ouvertement, les jeunes expriment ce
que les adultes ressentent confusément par rapport au monde actuel et à un futur
incertain : davantage quun malaise, il sagit dun "mal-être"
auquel tous, magistrats et peuple de ce pays, nous devons être attentifs.
"On ne redresse pas un arbre qui a poussé tordu", dit-on. En ce jour où
nous sommes aussi invités à lexamen de notre conscience, il convient de nous
demander si ce mal-être auquel nous faisions allusion, ce développement anarchique et
tourmenté de la société, ne provient pas notamment du fait que, dans nos familles
déjà mais dans dautres milieux aussi, nous hésitons à proposer aux enfants et
aux jeunes une référence solide favorisant leur croissance harmonieuse, non seulement en
stature et en force, mais aussi en sagesse autrement dit (osons le mot), le modèle
de parents, denseignants, déducateurs, de patrons dapprentissage,
demployeurs bienveillants mais fermes et exigeants parce que déjà exigeants avec
eux-mêmes.
Cest parce que nos ancêtres de 1832 se sont efforcés de se conformer au tuteur
de lois divines et morales qui paraîtraient insupportables aujourdhui que notre
peuple a progressé, que larbre de la justice sociale et de la prospérité a
étendu ses branches sur lensemble du pays. Cest au prix dun effort
comparable, mais adapté aux circonstances actuelles, que nous pourrons aider une jeunesse
parfois désemparée à devenir ce quelle est : lavenir de notre pays.
Cest à ce prix que, toutes générations confondues et avec laide de Dieu,
nous pourrons espérer dresser un arbre qui, loin de devoir être coupé et jeté au feu,
donnera beaucoup de fruit52.
Je voudrais ici témoigner de toute notre reconnaissance envers Dieu, à qui revient
tout honneur et toute gloire. Il tient le coeur des rois dans Sa main et lincline
comme Il le veut. Il peut même, dans Sa miséricorde, conduire nos autorités
sécularisées à proclamer bien haut la Vérité dont notre pays a tant besoin. Sans
doute cette grâce est le fruit des prières des chrétiens fidèles dans notre pays, de
leur foi en Dieu et de leur obéissance à répandre dans ce siècle enténébré par un
humanisme sans Dieu, la Vérité, la lumière de la Révélation de Dieu, la bonne odeur
de Jésus-Christ. Persévérons dans ce chemin afin que, par les interventions
miséricordieuses de Dieu sur nos patries vaudoise et valaisanne, nous puissions à
nouveau nous exclamer, jubilant avec le psalmiste :
Heureux le peuple dont lÉternel est le Dieu.
Psaume 144 : 15
_____________________________
1 Conférence
donnée lors de l'Assemblée générale annuelle du Renouveau Rhodanien, le 30
septembre 1982 à Martigny. Texte publié dans les numéros de mars et davril 1984
de la revue Finalités.
2 Ces confessions
réformées classiques peuvent se trouver dans les recueils suivants : Confessions et
Catéchismes de la Foi réformée, Labor et Fides, Genève, 1986 et Les Textes de
Westminster, Kerygma, Aix-en-Provence, 1988.
3 Charles
Journet, LUnion
des Eglises, Bernard Grasset, Paris, 1927.
4 Marc
Boegner, LExigence
oecuménique, Albin Michel, Paris, 1968. Cet ouvrage est d'ailleurs fort utile pour
une bonne intelligence de l'histoire religieuse de notre époque.
5 C'est un tel esprit qui caractérise la pensée de
Plinio Corrêa de Oliveira lorsqu'il fustige ce qu'il appelle l'oecuménisme
exaspéré. Cet oecuménisme,
(
) fait en sorte d'extirper tout caractère militant des
relations entre l'Église catholique et les autres religions. Cet oecuménisme extrême
s'appuie sur un relativisme ou syncrétisme religieux évident.
Il s'explique,
Il est maintenant opportun de faire une remarque. L'oecuménisme
exaspéré produit chez les catholiques aussi bien que chez leurs frères séparés,
qu'ils soient schismatiques, hérétiques ou autres, une confusion dramatique, sans doute
une des plus tragiques de ce siècle déjà si lourd de désordres. En effet il n'existe
pas sur le plan religieux de plus grand danger que le relativisme. Il menace toutes les
religions. Le catholique authentique, tout comme chaque frère séparé qui professe
sérieusement sa propre religion, doit lutter contre lui. Dans cette perspective cette
lutte ne pourra réussir que si chacun s'efforce de conserver intact le sens naturel et
spécifique propre à son credo, contre les interprétations du relativisme qui le
déforment et le corrodent. Dans ce combat l'allié du vrai catholique sera l'hébreu ou
le musulman qui n'a pas de doute pas seulement sur ce qui nous unit, mais aussi sur
ce qui nous sépare. Ce n'est qu'à partir de cette position que le relativisme pourra
être refoulé à toutes les frontières qu'il cherche à pénétrer. Ainsi, seulement,
les échanges d'arguments sous leurs différentes formes y compris la dispute pure
et simple et la polémique pourront contribuer à acheminer les esprits vers
l'unité. "Entente claire, amitié longue", dit la maxime. Seule la
clarté de pensée et d'exposé mène vraiment à l'unité. L'oecuménisme exaspéré qui
porte chacun à occulter ou à sous-évaluer les vrais points de friction, mène à un
régime de "maquillage" qui ne peut que favoriser le relativisme :
l'ennemi puissant de toutes les religions.
Roberto de Mattei, Le croisé du XXe siècle. Plinio Corrêa de Oliveira, L'Age
d'Homme, Lausanne, 1997, p. 270-271.
6 Voyez l'étude
magistrale de Rousas John Rushdoony, The Foundations of Social Order. Studies in the
Creeds and Councils of the Early Church, Presbyterian and Reformed, Nutley, 1968.
7 Blaise Pascal, Oeuvres.
(Édition F. Strowski), Olendorff, Paris, 1931, Tome III, p. 315.
8 Jean
Hoffman, La
Crise de lÉthique, A.V.P.C., Lausanne, 1982, p. 3. Voyez à ce sujet :
Jean-Marc Berthoud, Apologie pour la Loi de Dieu, L'Age d'Homme, Lausanne, 1996.
9 Pour une utile
introduction à ce sujet voyez : Jean-Philippe Chenaux, Le Retour de la Doctrine
sociale de l'Église, Centre Patronal, Lausanne, 1991.
10 Étienne Cattin, La
Doctrine sociale et Politique du Cardinal Pie, Nouvelles Editions Latines, Paris.
11 Frédéric Le
Play (1806-1882), LOrganisation du Travail selon la Coutume des Ateliers et la
Loi du Décalogue (1870) ; Les Ouvriers européens (1877-1879) ; La
Réforme sociale (1864) ; etc. Sur Le Play : R. A. Nisbet, The Sociological
Tradition, Heinemann, London, 1967, p.61-70 ; E. Todd, La troisième Planète.
Structures familiales et systèmes idéologiques, Seuil, Paris, 1983 ; Dorothy
Herbertson, The Life of Frédéric Le Play, Branford and Farquharson, 1950.
12 Albert de Mun, Discours
(4 vol.), 1871-1887 ; Ma Vocation sociale, 1871-1875 ; Combats
dhier et daujourdhui, 1910.
13 La Tour-du-Pin, Aphorismes
de Politique sociale, Beauchesne, Paris, 1930 ; Vers un Ordre social chrétien.
Jalons de route, 1882-1907, Dominique Martin Morin, Bouère, 1987 (1907). Voyez aussi
: Jean Rivain, Un Programme de Restauration sociale. La Tour-du-Pin précurseur, Le
Livre, Paris, 1926.
14 Léon XIII, Rerum
novarum (15 mai 1891). Sur la Condition des Ouvriers.
15 Pie XI, Quadragesimo
anno (15 mai 1931). Sur la Restauration de lOrdre social. E. J.
Chevalier, La Communauté humaine selon lEsprit chrétien. Documents, St.
Paul, Fribourg, 1944.
16 Marcel Clément, LÉconomie
sociale selon Pie XII, Nouvelles Éditions Latines, Paris, 1953, 2 vol.
17 Étienne Gilson, Pour
un Ordre catholique, Desclée de Brouwer, Paris 1934.
18 Marcel De Corte, Incarnation
de l'Homme, Médicis, Paris, 1942 ; Essai sur la Fin d'une Civilisation,
Médicis, Paris, 1949 ; Économie et Morale, s.l.n.d. Ce dernier ouvrage
mériterait d'être édité. Pour une bibliographie des ouvrages de Marcel De Corte voyez
le numéro spécial Nº 196 Septembre-Octobre 1975 que la revue Itinéraires
lui a consacré.
19 Jean
Ousset, LAction,
Montalza, Paris ; Pour quIl règne, Office international, Paris, 1970 ; Marxisme
et Révolution, Montalza, Paris, 1970.
20 Michel Creuzet, Les
Corps intermédiaires, Cercles de Saint-Joseph, Martigny, 1964. Michel Creuzet et Jean
Ousset, Le Travail, Montalza, Paris, 1962.
21 Marcel Clément, Le
Travail. Une Réponse chrétienne au dialogue avec le capital, Perrin, Paris, 1962 ; Le
Chef dEntreprise, Nouvelles Êditions Latines, Paris, 1958 ; La Corporation
professionnelle, N.E.L., Paris, 1958.
22 Jean
Daujat, LOrdre
social chrétien, Beauchesne, Paris, 1970.
23 Louis
Salleron, Essai
sur le Principe de Population de Malthus, Hatier, Paris, 1972 ; Libéralisme et
Socialisme du XVIIILibéralisme et
Socialisme du XVIIIe Siècle à nos Jours, Club du Livre Civique,
Paris, 1977 ; Diffuser la Propriété, N.E.L., Paris, 1964 ; Autorité et
Commandement dans lEntreprise, Entreprise Moderne dÉditions, Paris, 1960
; LOrganisation du Pouvoir dans lEntreprise, Entreprise Moderne
dÉditions, Paris, 1966.
Signalons également louvrage de R.-L. Bruckberger, Le
Capitalisme, mais cest la Vie !, Plon, Paris, 1983, et toute loeuvre
admirable de léconomiste allemand, Wilhelm Röpke et en particulier son
volume, Au-delà de lOffre et de la Demande. Vers une Économie humaine,
Payot, Paris, 1961. Loeuvre de Jacques Rueff va dans le même sens réaliste et
chrétien.
24 De Jean
Madiran,
voyez la revue Itinéraires, 4 rue Garancière, F-75006 Paris. Ses éditoriaux ont
été rassemblés en trois volumes chez Dominique Martin Morin.
25 Voyez les
nombreuses publications de l'Action Familiale et Scolaire, 31, rue Rennequin,
F-75017 Paris.
26 Antoine Murat,
Le
Catholicisme social en France. Justice et Charité, Editions Ulysse, Bordeaux, 1980.
27 Pie X, Lettre
Encyclique : Il fermo proposito (11 juin 1905), cité par R. Kokel et D. Lathoud,
Pie
X, le Pape évangélique, Editions S.A.R.L., Genève, 1951, p. 193.
Louvrage remarquable de Jean Gaudemet, LÉglise dans
lEmpire romain (IVLÉglise dans
lEmpire romain (IVe-Ve siècles), Sirey, 1958, 770 p., démontre, on
ne peut plus clairement, que la doctrine sociale de lEglise, tant dans son
expression réformée que romaine, nest aucunement une invention des temps modernes.
Il sagit dune transposition fidèle, adaptée aux conditions actuelles, de
lenseignement séculaire de lÉglise chrétienne. Louvrage de Henri
Charlier, Création de la France, (Dominique Martin Morin, Bouère, 1982) donne un
excellent aperçu de lhistoire de linfluence de cette doctrine sociale
chrétienne sur la vie du peuple français. Pour la Suisse, les ouvrages de Gonzague de
Reynold montrent clairement le rayonnement, dans tous les aspects de la vie sociale et
culturelle, de l'influence du Christianisme. Un roman épique tel celui d'Eugenio Corti,
Le
Cheval rouge (L'Age d'Homme, 1997) décrit de manière admirable le conflit
l'axe même de toute notre histoire entre un monde encore puissamment marqué par
le christianisme et le totalitarisme moderne à travers l'épopée poignante, par moments
terrifiante, de jeunes soldats italiens engagés dans la Deuxième Guerre mondiale. Pour
une analyse historique de la même réalité, voyez les chefs-d'oeuvre de Gonzague de
Reynold, La Démocratie et la Suisse. Essai d'une Philosophie de notre histoire
nationale, Chandelier, Bienne, 1934 et L'Europe tragique. La Révolution moderne.
La Fin d'un monde, Spes, Paris, 1935. Pour une vision plus philosophique de la
déchristianisation, de l'athéisation de notre civilisation nous ne saurions trop
recommander l'oeuvre du philosophe italien d'Augusto Del Noce et en particulier son
ouvrage L'Irréligion occidentale, Fac, Paris, 1995, traduction partielle de son
livre fondamental Il problemo dell'ateismo, Il Molino, Bologne, 1990 (1964). Voyez
également sur le même thème, Michael J. Buckley, At the Origins of Modern
Atheism, Yale
University Press, New Haven, 1987.
28 Jean Charbonnier,
Coligny ou les Sermons imaginaires, P.U.F., Paris, 1982, p. 52.
29 Albert-Marie
Schmidt, Études sur le XVIÉtudes sur le XVIe Siècle, Siècle, Albin Michel, Paris, 1967 ; Jacques
Pineaux, La Poésie des Protestants de Langue française (1559-1598),
Klincksieck,
Paris, 1971.
30 André
Biéler, La
Pensée économique et sociale de Calvin, Georg, Genève, 1961 ; Marc-Édouard
Chenevière, La Pensée politique de Calvin, Labor, Genève, 1937 ; Léon
Wencelius, L'Esthétique de Calvin, Slatkine, Genève, 1979 (1937) ; Richard
Stauffer, Dieu, la Création et la Providence dans la Prédication de Calvin, Peter
Lang, Berne, 1978 ; Pierre Marcel, Calvin et Copernic. La légende ou les Faits ? La
Science et l'Astronomie chez Calvin, La Revue Réformée, Tome XXXI, Nº 121, 1980 ;
Susan E. Schreiner, The Theater of His Glory. Nature and the Natural Order in the
Thought of John Calvin, The Labyrinth Press, Durham N. C., 1991 ; Harro Höpfl, The
Christian Polity of John Calvin, C.U.P., Cambridge, 1985 ; Charles Partee, Calvin
and Classical Philosophy, E. J. Brill, Leiden, 1977 ; Arvin Vos, Aquinas, Calvin,
and Contemporary Protestant Thought, Christian University Press, Washington D.C.,
1985.
31 Pierre Viret
(1511-1571), Instruction chrétienne en la Doctrine de la Loi et de lÉvangile,
Genève, 1564. Sur Pierre Viret, voyez : Jean Barnaud, Pierre Viret, sa Vie et son
Oeuvre, Carayol, Saint-Amour, 1911 ; Georges Bavaud, Le Réformateur Pierre Viret
(1511-1571). Sa Théologie, Labor et Fides, Genève, 1986 ; Robert D. Linder, The
Political Ideas of Pierre Viret, Droz, Genève, 1964. Jean-Marc Berthoud, Pierre
Viret : The Apologetics and Ethics of the Reformation, Éditions Pierre Viret, Case
postale 468. CH-1001 Lausanne), 1996.
32 Louis
Burnier,
Histoire
littéraire de lÉducation morale et religieuse en France et dans la Suisse romande,
Bridel, Lausanne, 1864, 2 vol.
33 Collectif,
Alexandre
Vinet. Regards actuels, Cahiers de la Renaissance Vaudoise, Lausanne, 1996.
34 Agénor de
Gasparin (1810-1871), La Famille. Ses Devoirs, ses Joies et ses Douleurs, Paris,
1865, 2 vol. ; LEnnemi de la Famille, Paris, 1874 ; La Liberté morale,
Paris, 1867, 2 vol. Les de Gasparin furent longtemps propriétaires du château de
Valeyres-sous-Rances qui est à présent la demeure de la famille Morel et fut pendant de
nombreuses années le haut lieu de la Ligue Vaudoise. C'est là que se sont tenus
pendant plus de quarante ans les célèbres Séminaires de Valeyres.
35 Voyez
létude capitale de John W. Whitehead, The Second American Revolution, Davis
C. Cook, Elgin, 1982.
36 J. H. Thornwell
(1812-1862), The Collected Writings, Banner of Truth, Edinburgh, 1975, 4 vol. ; B.
M. Palmer, The Life and Writings of James Henley Thornwell, Banner of Truth,
Edinburgh, 1974.
37 Robert L. Dabney
(1820-1898), Lectures in Systematic Theology, Zondervan, Grand Rapids, 1976 (1878)
; Discussions, Sprinkle, 1979-1982, (4 vol.) ; The Practical Philosophy, Sprinkle,
Harrisonburg, 1984 (1897), etc. J. C. Johnson, The Life and letters of Robert Lewis
Dabney, Banner of Truth, Edinburgh, 1977.
38 Agrippa
dAubigné (1552-1630), Oeuvres, Gallimard Pléiade, Paris, 1969 ; Histoire
Universelle ; Droz, Genève, 1981 (1624) ; Armand Garnier, Agrippa
dAubigné et le Parti Protestant, Fischbacher, Paris, 1928 (3 vol.) ; Samuel
Rocheblave, Agrippa dAubigné, Je Sers, Paris, 1930.
39 J.-H. Merle
dAubigné (1794-1872), Histoire de la Réformation, Paris, 1835-1875, 13 vol.
40 Groen van
Prinsterer, Ongeloof en Revolutie, Leiden, 1847. Sur l'oeuvre de Groen van
Prinsterer, voyez l'étude du pasteur Huib Klink à paraître dans un prochain numéro de
Résister
et Construire.
41 Frank Vandenberg,
Abraham Kuyper. A Biography, Padeia Press, St. Catharines, Ontario, 1978 ; Abraham
Kuyper (1837-1920), Lectures in Calvinism, Eerdmans, Grand Rapids, 1975 (1898).
42 D. H. T.
Vollenhoven fut professeur de philosophie calviniste pendant de nombreuses années à
lUniversité libre dAmsterdam. Il est l'auteur de nombreux livres.
43 Herman Dooyeweerd
(1894-1977), Philosophie chrétienne et Philosophie autonome, La Revue Réformée,
Tome X, No. 3, 1959 ; A New Critique of Theoretical Thought, Presbyterian and
Reformed, Philadelphia, 1953-1958 (4 vol.) ; In the Twilight of Western Thought,
Craig Press, Nutley, 1965 ; Roots of Western Culture. Pagan, Secular and Christian
Options, Wedge, Toronto, 1979 ; S. T. Wolfe, A Key to Dooyeweerd, Craig Press,
Nutley, 1978 ; Jan Dengerink, Herman Dooyeweerd, La Revue Réformée, Tome 28, No
111, 1977.
44 Voyez le
Institute
of Christian Studies, 229 College Street, Toronto, Canada M5T 1R4.
45 Pierre Courthial
dans un article intitulé Le Mouvement réformé de Reconstruction chrétienne,
publié par la revue Hokhma, Lausanne, No. 14, 1980, p. 44-70, donne un aperçu
très instructif de cette tradition de pensée sociale chrétienne. Nous recommandons
également de cet auteur le recueil darticles, Fondements pour lAvenir,
Kerygma, Aix-en-Provence, 1981 et son chef d'oeuvre, Le Jour des petits
Recommencements, L'Age d'Homme, Lausanne, 1996.
46 Richard Crews,
Cornelius
Van Til , Défenseur de la Foi, Résister et Construire, Nº 37-38, p. 40-55.
47 Cornelius Van
Til, A Christian Theory of Knowledge, Baker, Grand Rapids, 1969 ; In Defense of
the Faith, Presbyterian and Reformed, Nutley, 1967-1976, 5 vol. ; Apologetics,
Presbyterian and Reformed, Nutley, s.d. ; The Defense of the Faith, Presbyterian
and Reformed, Nutley, 1975, etc. ; R.J. Rushdoony, By What Standard ? An Analysis of
the Philosophy of Cornelius Van Til, Thoburn Press, Fairfax, 1958 ; R. J. Rushdoony,
Van
Til, Presbyterian and Reformed, Nutley, 1960 ; Gary North (Editor), Foundations of
Christian Scholarship. Essays in the Van Til Perspective, Ross House Books, Vallecito,
1976.
48 Rousas J.
Rushdoony, The Institutes of Biblical Law, Presbyterian and Reformed, Nutley, 1973
; Law and Society, Ross House Books, Vallecito, 1982 ; (ces deux ouvrages sont
utilisés comme manuels de droit naturel à la Faculté de droit de lUniversité
Catholique de Notre Dame) ; Systematic Theology, 2 vol., Ross House Books, 1994 ;
Commentary
on Romans and Galatians, Ross House Books, 1997 ; The Roots of Reconstruction, Ross
House Books, 1991 ; Politics of Guilt and Pity, Ross House Books, Vallecito, 1996
(1970) ; The Foundations of Social Order. Studies in the Creeds and Councils of the
Early Church, Presbyterian and Reformed, Nutley, 1968 ; The One and the Many.
Studies in the Philosophy of Order and Ultimacy, Craig Press, Nutley, 1971 ; The
Word of Flux. Modern Man and the Problem of Knowledge, Thoburn Press, Fairfax, 1975 ;
Intellectual Schizophrenia. Culture, Crisis and Education, Craig Press, Nutley, 1961 ; avec E.
Powell), Tithing and Dominion, Ross House Books, Vallecito, 1979 ; The Roots of
Inflation, Ross House Books, Vallecito, 1982 ; The Messianic Character of American
Education, Craig Press, Nutley, 1963 ; The Philosophy of the Christian Curriculum,
Ross House Books, Vallecito, 1981. LInstitut "Chalcedon" (P.O. Box
158, Vallecito, 95251, California, USA) édite un journal mensuel, le Chalcedon Report,
envoyé gratuitement à ceux qui en font la demande. Il édite également une revue
semestrielle, The Journal of Christian Reconstruction. Le fondateur et Président
de Chalcedon est le Dr Rousas John Rushdoony. Nous vous recommandons vivement tous
ses travaux.
49 Dans cette
tradition, parmi bien d'autres études, nous vous recommandons les ouvrages suivants :
Frederick Nymeyer, First Principles in Morality and Economics, Libertarian Press,
South Holland, 1955-1960, 6 vol. ; E. L. Hebden Taylor, The Christian Philosophy of Law
Politics and the State, Craig Press, Nutley, 1966 ; Reformation or Revolution, Craig
Press, Nutley, 1970 (Cet ouvrage contient une étude fort intéressante des différences
entre lenseignement catholique et réformé sur les questions sociales) ;
Economics,
Money and Banking. Christian Principles, Craig Press, Nutley, 1978 ; Gary North,
An
Introduction to Christian Economics, Craig Press, Nutley, 1974 ; Marxs
Religion of Revolution, Craig Press, Nutley, 1968 ; The Dominion Covenant -
Genesis. An Economic Commentary on the Bible, Institute for Christian Economics (P.O.
Box 8000 Tyler, Texas 75711, U.S.A.), 1982, etc, ; Greg L. Bahnsen, Theonomy in
Christian Ethics, Craig Press, Nutley, 1977 ; Homosexuality. A Biblical View,
Baker, Grand Rapids, 1978 ; H. O. J. Brown, The Reconstruction of the Republic,
Arlington House, New Rochelle, 1977 ; David Chilton, Productive Christians in an Age of
Guilt Manipulators, Institute for Christian Economics, Tyler, 1981 ; John Whitehead,
The
Separation Illusion, Mott Media, Milford, 1977 ; R. E. McMaster, Wealth for All.
Religion, Politics and War ; Economics, A. N. Inc., Montana ; Francis A. Schaeffer,
How
Should We Then Live ? The Rise and Decline of Western Culture, Revell, Old
Tappan,
1979 ; Whatever Happened to the Human Race ?, Revell, Old Tappan, 1979 ; A
Christian Manifesto, Crossway Books, Westchester, 1981.
Aujourd'hui la relève de ce mouvement se situe en particulier autour
de la revue Christianity and Society (P.O. Box 2, Taunton, Somorset, TA1 2WZ,
Angleterre) et dont le rédacteur est Stephen C. Perks. Il est l'auteur de plusieurs
ouvrages, The Christian Philosophy of Education Explained, 1992 ; Christianity
and the Law, 1993 ; The Nature, Government and Function of the Church, 1997,
The Kuyper Foundation, Taunton. A commander à la même adresse que la revue.
50 René Berthod,
Une
École pour les Enfants !, AVPC, Lausanne, 1982.
51 Gazette de
Lausanne, 10-11 octobre 1981.
52 Feuille des Avis Officiels du Canton de
Vaud, mardi 14 septembre 1982.
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